Dernier volet de la rétrospective sur le métier de vétérinaire. Préconisations de base sur une saison et clés de réussite pour garder le plus longtemps possible un poney en forme : le Docteur Adélaïde Alexandre nous livre quelques conseils sur la préparation d’un poney de haut niveau.
Poney As : Quelles sont tes préconisations vétérinaires sur une saison ?
Adélaïde Alexandre : Pour moi, l’idéal est avant tout de former une équipe autour du poney. Une équipe composée bien entendu du cavalier et de son entourage, du chef d’équipe, du vétérinaire, de l’ostéopathe, du dentiste effectivement mais aussi du maréchal ferrant et éventuellement du vétérinaire d’équipe le cas échéant. Il faut que tout le monde travaille de concert pour amener le poney au mieux de sa forme sur les échéances visées. D’un point de vue purement vétérinaire, il me semble que de faire un check-up de fin de saison est essentiel. Il met en évidence les points faibles du poney et d’adapter en fonction le travail d’hiver. Même s’il est vrai qu’il n’y a plus vraiment d’arrêt dans la saison aujourd’hui, je pense qu’il est important de ménager une trêve en cours d’année pour revenir aux basiques : un travail de base du poney qui permet de consolider les acquis et de construire une musculature forte qui lui permettra de soutenir les efforts tout au long de la saison. Le rôle du vétérinaire est à ce moment-là de mettre en lumière les détails à améliorer et de donner des pistes sur les exercices qui permettront, s’ils sont bien réalisés, d’aider le poney à tolérer ses lésions de base. Vient ensuite le temps des traitements (si nécessaire). En général, nous les réalisons avant le début de la saison et nous les adaptons en fonction des points faibles mis en évidence lors du check-up et de l’évolution hivernale. Pour le suivi et les soins en cours de saison, il est très difficile de répondre car ils dépendent vraiment de chaque poney. Je pense que pour avoir un suivi optimal, il faut faire du cas par cas et revoir chaque fois le poney avec un œil nouveau pour ne pas se laisser biaiser, mais tout en ayant conscience de ses points faibles et de ses points forts (c’est bien là toute la difficulté !)
Dans tous les cas, il faut avant tout être attentif à ce que nous dit le poney ! Sans tomber dans l’excès, si le cavalier remarque un changement, un manque d’envie, un comportement inhabituel alors qu’il n’y a pas de faute de monte notable, il faut se remettre en question et chercher la cause. Chaque poney, comme chaque athlète, est très différent, certains tolèreront très bien de « grosses » lésions alors que d’autres ne tolèreront pas de « petites » choses ; le but de notre travail est de trouver ce qui gène et comment aider le poney à faire son sport avec ses lésions car un poney sans lésions… ça n’existe pas !
Vous l’avez compris, pas de généralité mais du cas par cas ! Il en va de même pour l’ostéopathie et la dentisterie, bien que nous préconisions souvent au moins une visite du dentiste tous les ans.
PA : Quelles sont les clés de la réussite pour garder le plus longtemps possible un poney en forme pour sauter les grosses épreuves ?
AA : Je suis intimement convaincue que la clé de la réussite se situe dans l’attention et le suivi que l’on porte à son poney. Sans être alarmiste, il faut savoir détecter très tôt les petits détails précurseurs : un tendon ou un boulet qui gonfle, qui est un peu chaud après un effort… Il faut savoir écouter son partenaire, savoir lui laisser sa part de décision, ce n’est pas pour rien que l’on parle de couple ! Le poney doit avoir sa place dans le dialogue et il faut savoir préserver son moral ! Travailler en trotting, à l’extérieur, en balade, rênes longues, partager des moments de complicité à pied, à la longe est pour moi bien plus important quand le travail est acquis que de répéter et répéter des sauts. Sauter pour sauter ne sert à rien, hormis peut-être à rassurer le cavalier ! Il faut sauter lorsqu’on a besoin de régler un problème technique et bien souvent, il n’y a pas besoin de mettre de hauteur pour régler ces difficultés, des obstacles à 1 mètre sont bien souvent suffisants. Et puis, il faut penser malgré tout que les poneys ont, comme tout athlète, un capital santé limité et que chaque effort de « trop » ou encore pire, juste pour « frimer » ou « en mettre plein la vue », c’est un saut ou un effort que vous ne pourrez demander en fin de tour. Ce sont des propos un peu durs car on a toujours envie d’aller plus haut, plus vite mais le dicton « qui veut aller loin sait ménager sa monture » est particulièrement vrai pour tous les chevaux de haut niveau !