Retour à la liste d'articles Article du 04/12/2025

Hélios Love de Cé : une lignée, une vocation

Il y a des poneys qui marquent un cavalier, un souvenir d’enfance. Et puis il y a ceux qui construisent des vies. Hélios Love de Cé appartient à cette seconde catégorie : tout comme sa mère et sa sœur utérine, l’étalon New Forest né en 1995 est devenu le fil conducteur autour duquel s’est tressée la destinée d’Emmanuelle Rabillon.

Publi-rédactionnel

Hélios Love de Cé photographié en juin dernier à l'occasion de ses 30 ans, aux côtés de son éleveuse Emmanuelle Rabillon et de la présidente de l'AFPNF, Patricia Cerina - ph. coll. privée
Hélios Love de Cé photographié en juin dernier à l’occasion de ses 30 ans, aux côtés de son éleveuse Emmanuelle Rabillon et de la présidente de l’AFPNF, Patricia Cerina – ph. coll. privée

Aujourd’hui âgé de 30 ans, nourri de ses « soupes », Hélios Love de Cé passe ses journées au paddock avant de regagner son box pour la nuit. « On le gère comme un vieux poney, mais il se porte bien, même s’il nous a valu quelques grosses frayeurs », répond sa propriétaire lorsqu’on lui demande, en préambule, des nouvelles de l’un de ses doyens. Une vie équestre qui commence bien avant lui, dans les années 1980, alors qu’Emmanuelle Rabillon n’est encore qu’une petite fille passionnée déambulant avec sa petite ponette dans les chemins de La Baule.

 

Nuit d’Été, la fondation

L’histoire d’Hélios trouve en réalité ses racines au milieu des années 80. À cette époque, les parents d’Emmanuelle Rabillon lui offrent une petite ponette New Forest, Nuit d’Été, affectueusement surnommée Quinta (un nom que Madame Rabillon n’hésitera pas à réattribuer à plusieurs de ses équidés, ndlr).

Nuit d’Été en compétition, sous la selle d'Emmanuelle Rabillon - ph. coll. privée
Nuit d’Été en compétition, sous la selle d’Emmanuelle Rabillon – ph. coll. privée

« Mon grand-père avait une maison à quelques mètres du centre équestre de La Baule. C’est ici que j’ai commencé à monter à l’âge de 7 ans, le week-end et pendant les vacances. Le virus a pris immédiatement. J’ai rapidement eu ma première ponette, laquelle a été mise à la reproduction après que nous lui ayons décelé des petits problèmes physiques. Nous sommes allés chez Franck Pirard et c’est chez lui que nous avons rencontré Nuit d’Été. Avec elle, tout a démarré… », raconte l’éleveuse de l’écurie de Cé. Tout juste débourrée, Nuit d’Été (par Mount Pleasant Flight) n’a que peu d’expérience, mais c’est avec elle qu’Emmanuelle Rabillon fait ses premières armes. « J’allais à la plage et faisais beaucoup de choses avec « Quinta ». Nous avons fait toutes les deux les 400 coups ! Nous avons aussi beaucoup appris à travers des stages et avons réussi à évoluer sur des épreuves chevaux à 1,20 m », poursuit-t-elle. De belles barres pour une ponette d’ 1,40 m ! Sur des épreuves chevaux, ce n’était pas commun. « Lorsque j’étais gamine, vers 16 ou 17 ans, je pense avoir été l’une des premières à sortir des poneys sur des épreuves chevaux dans la région. J’étais un peu un ovni, les gens me regardaient bizarrement », se souvient elle, amusée, en rappelant les qualités de sa complice : « c’était une ponette extraordinaire, elle avait beaucoup de sang et allait dans le feu ! ».

Nuit d’Été étant une ponette New Forest, Emmanuelle Rabillon se prend peu à peu de passion pour cette race. La cavalière pousse même sa curiosité plus loin. Elle fouille, cherche, et utilise l’outil de l’époque, le Minitel, pour y retrouver la trace de la mère de sa ponette : Holmbush Sunset. « J’ai contacté ses propriétaires et ils ont bien voulu me la vendre. Elle avait 23 ans et devait toiser autour du mètre 45 ». Holmbush Sunset (par Brookside David, père entre autres de l’étalon Mudeford Spark qui a marqué l’élevage des Ifs, ndlr), importé d’Angleterre, arrive donc chez les Rabillon avec, déjà, 11 poulains à son actif — d’abord chez Jean Lambert, puis pour le compte de Gérard Gayet et de la famille Legay. Chez elle, elle produit Genita Love de Cé, par Udou des Étangs, née en 1994, puis, l’année suivante, à 25 ans, son dernier produit, Hélios Love de Cé. « Il est né une quinzaine de jours avant mon fils. Je me rappelle avoir fait le poulinage enceinte jusqu’au cou ! ».

 

Hélios Love de Cé et Abel, le fils d'Emmanuelle Rabillon, aux championnats de France de 2010 - ph. PSV
Hélios Love de Cé et Abel, le fils d’Emmanuelle Rabillon, aux championnats de France de 2010 – ph. PSV

Hélios prend la relève

Le poulain grandit dans l’ambiance familiale, remporte la classe des mâles de 3 ans au National New Forest et « représente la race, si je me rappelle bien, lors du Salon du Cheval et de l’Agriculture ». Les années suivantes se déroulent au rythme de la vie de sa propriétaire: « À 4 ans, je ne l’ai pas sorti parce que je venais d’avoir ma fille, mais j’ai fait les 5 ans avec lui ». Hélios devient un poney de concours extrêmement fiable avec les enfants : « il a emmené les élèves du club en compétition et a débuté mes enfants. Il a tourné en D2, D1, As 2 et terminé 8ᵉ / 30 du championnat E2 en 2008, toujours sur 1,15 m, avec moi ». En parallèle, ses qualités de gentillesse et de respect lui permettent de mener un mode de vie au plus près de ses juments. « Il était tellement bien dans sa tête que je le mettais au pré avec les poulinières : j’allais le chercher le jeudi soir, on le montait vendredi et samedi, le dimanche il était en concours et le soir il retournait avec ses juments. On a eu pas mal de poulains de cette façon. Il était hyper gentil et facile, les juments poulinaient avec lui ». Hélios Love de Cé arrêtera les concours en 2013, sans jamais avoir perdu sa vigueur ni son envie de sauter. « Quand on le lâchait en carrière, il allait sauter tout seul les obstacles. C’était naturel chez lui ».

 

Pedigree et descendance

Hélios Love de Cé est un fils de Cyrius Vennevelle, un étalon qui concourait à l’époque sur les épreuves B3 et B4 chevaux. Un choix réfléchi pour son éleveuse : « j’ai choisi Cyrius car j’avais envie d’adresser à « Holmbush » un étalon New Forest. À mon avis, il était le meilleur de sa race à l’époque. Il sortait avec Sylvie Thomas sur de belles épreuves chevaux. Il était aussi dans la région et accessible, et surtout, il représentait ce que je recherchais. Lorsque j’ai vu Cyrius, je me suis dit : c’est celui-là ! ».
Le croisement entre Holmbush Sunset et l’étalon gris donnera Hélios, 1,46 m, étalon reproducteur et détenteur d’un IPO 137. Son éleveuse le juge complet : un excellent mental, respectueux des barres et doté de sang ; des qualités qu’il a largement transmises à sa production.

Hélios, 30 ans et Marceau, 2 ans, le petit-fils d'Emmanuelle Rabillon - ph. coll. privée
Hélios, 30 ans et Marceau, 2 ans, le petit-fils d’Emmanuelle Rabillon – ph. coll. privée

Hélios Love de Cé produira une centaine de poulains entre 2000 et 2023, tous avec des points commun : de la franchise, du sang et un sens assez naturel de l’obstacle. « Ses produits ne sont pas tous maître d’école de petit niveau, mais plutôt des poneys de concours » complète l’éleveuse avant de poursuivre, « ils sont compétitifs et volontaires, même si certains, confiés à des cavaliers moins aguerris, n’ont pas toujours atteint le niveau auquel ils étaient destinés. Généralement, les élèves de notre club tournent jusqu’en Poney Élite, voire parfois en As 2 / As 1. Ce sont eux qui les valorisent bien que les jeunes, soient, je trouve, un peu moins motivés qu’à notre époque. Nos monitrices les montent donc aussi ».
Plus précisément, vingt-huit produits d’Hélios Love de Cé sont indicés à plus de 120 (4 ne portent pas l’affixe « Love de Cé » de Madame Rabillon) dont six à plus de 140. Ces derniers se nomment Quinta Love de Cé (IPO 141), Quinoa Love de Cé (IPO 149), Cooky Love de Cé (IPO 141, ISO 128), Delta Love de Cé (gagnante en GP As Poney Élite, CSIP, IPO 142), Folly Love de Cé (As Poney 1, IPO 143) et Hélios Love de Cé (13e de la finale des 7 ans, IPO 145). Cooky, Delta et Hélios partagent d’ailleurs le même pedigree, tout comme For Ever Love de Cé (IPO 125) « qui après avoir pouliné est prête pour les As 2 / As 1 ». Ce sont des produits d’Hélios et de la PFS Only Love de Cé, elle-même par Selim de Siam, un étalon PFS acheté également chez Franck Pirard et qui marquera l’élevage de Cé. « Le mariage complémentaire entre Hélios et les filles de Selim s’est révélé particulièrement pertinent », précisera-t-elle. Les produits d’Hélios montrent aussi une belle longévité à l’instar de Quinta Love de Cé, 21 ans, qui « tourne toujours en concours et a remporté cinq championnats de France en Poney 2 et 1 avec cinq cavaliers différents ». Le jeune Hélios Love de Cé tourne également sur le circuit de la Tournée des As, en As 2 / As 1, avec sa toute jeune pilote… et annonce de beaux moyens. « Son nom est un clin d’œil, un hommage à son père. C’est le dernier produit de sa mère : liste blanche, balzane, isabelle… gentil comme un cœur, on l’a mis très vite dans les mains d’enfants de 11 ans. C’est un amour de poney ! Il ne devait pas être vendu, mais la réalité financière nous a rappelés un peu à l’ordre ». Avant sa vente, Madame Rabillon a congelé sa semence, qui sera utilisée à l’avenir.
Parmi les derniers produits d’Hélios, il y a aussi la New Forest de croisement Kallas Love de Cé, classé 3e de la finale des femelles de 5 ans D du So’Pony cet été.

 

Une vie d’élevage, de doutes et de fidélité

« Mes parents n’étaient pas du tout dans le milieu du cheval. Un jour, en me promenant avec Nuit d’Été, j’ai aperçu une petite pancarte : “terrain à vendre”. Nous avons acheté ce premier hectare, puis un deuxième, un troisième… Mes parents ont vendu leur maison, en ont construit une ici, et nous avons pu installer nos chevaux avec nous. Selim de Siam était là, mes ponettes aussi, ma sœur avait une jument, et c’est ainsi que nous avons commencé l’élevage. Notre premier poulain est né en 1989, et trois autres ont suivi en 1990. Franck Pirard m’a confié des chevaux en dépôt-vente ou au travail – j’avais d’ailleurs acheté Vol Au Vent, un demi-frère d’Hélios -, je les travaillais, les revendais, et en rachetais de nouveaux. J’ai passé mon monitorat en 1992 et ouvert mon club en 1993, tout en poursuivant l’élevage. La structure existe depuis maintenant 33 ans », explique-t-elle. Avec Nuit d’Été par exemple, l’éleveuse a eu 11 produits dont les compétitifs Cooky Love de Cé (par Prince du Narais), IPO 133 et Forever Love de Cé (Pfs, par Selim de Siam), classée jusqu’en Grand Prix (IPO 146) du haut de son mètre 40 et mère de deux européens nés sous l’affixe « de Bélébat », Ulior en dressage et Vertige en CSO (IPO 178).
L’écurie de Cé d’Emmanuelle Rabillon, située aux Ponts de Cé, à côté d’Angers, compte aujourd’hui pas loin de 150 équidés et accueille 300 cavaliers chaque semaine, tout en comprenant un élevage canin. Le nombre de naissances de poneys et chevaux a été variable selon les saisons et tend à diminuer ces derniers temps : de trois ou quatre poulains les années calmes à une vingtaine les années fortes, toutes races confondues, du poney Shetland aux chevaux, Quarter Horse et Selle français inclus. « Je n’ai pas vraiment compté, mais l’élevage de Cé a vu naître, je pense, entre 300 et 400 poulains », précise-t-elle.

Aujourd’hui, Hélios Love de Cé a 30 ans, et avec lui s’écrit une histoire commencée presque par hasard. Une histoire construite de passion avant tout. « J’ai vraiment commencé avec rien… Et petit à petit, la structure s’est montée. J’ai appris tellement de choses avec mes premiers poneys. C’est un long parcours, difficile, et ça l’est toujours. Mais c’est vraiment chouette de voir que tout cela s’est concrétisé avec la naissance de bons poneys ! ».