Retour à la liste d'articles Article du 24/06/2020

Héloïse Le Guern : « Concourir sur les Grands Prix Poneys permet davantage de visibilité »

Héloïse Le Guern fait partie de ces cavaliers de l’équipe de France que nous voyons grandir depuis ses années sur le circuit Poney. Sélectionnée pour la première fois en 2013 avec les bleus, la complétiste a été cavalière au sein du Pôle Jeune FFE de Saumur avant de revenir dans les écuries familiales, à Angers. La tricolore retrace son parcours avec nous, un parcours où elle se voit de plus en plus en sécurité.

A poney, Héloïse Le Guern a remporté le titre de championne d’Europe par équipes avec Qarisma Duboidelanoue. C’était à Millstreet en 2014 – ph. Poney As
A poney, Héloïse Le Guern a remporté le titre de championne d’Europe par équipe avec Qarisma Duboidelanoue. C’était à Millstreet en 2014 – ph. Poney As

Poney As : Si nous évoquons Qarisma Duboidelanoue, que nous dis-tu ?
Héloïse Le Guern : Courageuse ! Notre rencontre a été un mal pour un bien en réalité. Mon poney précédent, Penvins de Dives, s’était malheureusement blessé au milieu de ma saison. Emmanuel Quittet, sélectionneur national des bleus à poney, m’avait conseillé d’aller en Ile-de-France essayer cette ponette car je me retrouvais à pied. À vrai dire, je n’avais également qu’elle en tête car c’était en hiver et peu de poney étaient disponibles. Je n’étais pas vraiment dans une bonne période, triste que mon poney soit blessé : c’était un peu la solution par dépit. Mais, l’essai s’est relativement bien passé. Ça restait une nouveauté, j’avais monté peu de poneys et Qarisma était assez particulière avec beaucoup de sang, une vraie pile électrique ! Tout le monde était assez surpris car tout collait bien entre nous.

Héloïse Le Guern et Qarisma Duboidelanoue sur le cross irlandais de Millstreet toujours – ph. Poney As
Héloïse Le Guern et Qarisma Duboidelanoue sur le cross irlandais de Millstreet toujours – ph. Poney As

P.A : Comment as-tu vécu tes premières sélections en équipe de France ?
H.L.G : Ma première sélection avec les bleus a été avec Penvins de Dives au Haras du Pin en 2013. J’étais assez fière d’être prise mais lorsqu’on est sélectionné pour le Pin, on sait que ce sont les « petits ». Évidemment, j’étais déjà très contente car c’était une première marche de franchie vers le championnat d’Europe auquel j’ai participé en 2014 pour la première fois avec Qarisma Duboidelanoue à Millstreet, en Irlande.

P.A : Championne d’Europe avec l’équipe de France Poney en 2014, sacrée championne de France Poney l’année suivante puis médaillée d’argent aux championnats d’Europe Juniors en 2016, que retiens-tu principalement de tes jeunes années ?
H.L.G : Il est très bien d’apprendre la gestion du stress si tôt pour la suite car tout devient plus facile lorsqu’on franchit les étapes. Vite apprendre à réfléchir en équipe est aussi très bien. Toute l’année, nous sommes les uns contre les autres bien que nous soyons tous amis. Mais une sélection à quatre en équipe est totalement différente. Puis, lorsqu’on fait partie des meilleurs quelle que soit la catégorie, on doit réfléchir et s’organiser comme des grands pour atteindre nos objectifs. Évidemment, nous voulons retourner défendre nos couleurs une fois à cheval alors on garde ce que l’on apprend, on apprend aussi des autres. Le staff français est bien plus présent lorsque l’on fait des internationaux et les championnats d’Europe : c’est une aventure à par entière.

Orage de LonguenéeENE avec qui Héloïse Le Guern a participé au championnat d'Europe Junior en Italie en 2016 – ph. Cisabelle Delecourt
Orage de Longuenée*ENE avec qui Héloïse Le Guern a participé au championnat d’Europe Juniors en Italie en 2016 – ph. Cisabelle Delecourt

P.A : Les portes du Pôle Jeune FFE basé à Saumur t’ont été ouvertes. Penses-tu que cela aurait été possible sans avoir été compétitrice sur le circuit Poney avant ?
H.L.G : Non, il est certain que concourir sur ces épreuves permet davantage de visibilité. Pour rentrer à l’ENE (École Nationale d’équitation de Saumur), il faut également un certain nombre de critères. Lorsque l’on veut courir sur le circuit Juniors, il faut un cheval apte à participer à des compétitions 1* avec déjà des qualifications. Je venais d’acheter une jument de 6 ans qui ne les avait pas du tout. Alors, comme le staff me connaissait grâce à mes performances à poney, ils m’ont proposé de venir à Saumur où là, il y avait des chevaux d’expérience à me confier. En arrivant à l’ENE, j’ai eu le statut de sportif de haut niveau ce qui a été un plus pour mes études supérieures afin d’avoir des horaires aménagés ainsi que des aides financières. Je suis également convoquée à énormément de stages fédéraux ce qui me permet d’engranger toujours plus d’expérience.

P.A : Aujourd’hui, tu es de retour chez toi, dans tes écuries près d’Angers. Quels sont les chevaux qui t’accompagnent ?
H.L.G : Je travaille avec ma mère. Nous allons développer la partie propriétaires tout en créant une réelle équipe de concours à poney… Affaire à suivre ! Nos poneys sont très sympas et peuvent aller en Grand Prix. J’ai deux chevaux dont une six ans, Carentine d’Orvaux Z, qui fait les Cycles Classiques. Nous l’avons acheté à ses 1 ans ½ sans forcément savoir ce qu’elle ferait. Canakine du Sudre Z est à mes côtés depuis plus d’un an dans le but d’aller assez vite sur les belles épreuves comme du 3/4*. Cette saison a été écourtée dû à la crise du Covid-19 mais l’objectif était d’aller courir les CCI 4*, on verra si cela est encore réalisable ou non. Enfin, je continue de monter les poneys de mes écuries comme Delta d’Ossitho sur les épreuves Jeunes.

Héloïse Le Guern et Orage de LonguenéeENE – ph. Alexandre Champin
Héloïse Le Guern et Orage de Longuenée*ENE – ph. Alexandre Champin

P.A : Comment analyses-tu l’évolution du poney de sport ces dernières années ?
H.L.G : Les poneys ont bien progressé, déjà quand je courrais sur ces épreuves certains ressemblaient plus à des petits chevaux qu’aux poneys lourds au sol que l’on a pu connaitre. En taille et poids, ils n’ont pas tant changer que ça, mais au niveau des allures, ce n’est plus du tout la même chose ! D’ailleurs, je monte un fils de Mon Nantano de Florys*SL qui appartient à mon frère. Il n’a que 7 ans et est entier, il est encore un peu compliqué avec les enfants même si nous connaissons la transition. Mais de temps en temps, j’ai l’impression de monter un petit cheval avec son caractère !

P.A : Le Concours Complet est régulièrement récompensé lors des championnats d’Europe et autres échéances mondiales toutes catégories confondues, à quoi cela peut être dû ?
H.L.G : Finalement, nous ne sommes pas si nombreux comme cavaliers à haut niveau. Les mentors restent en haut de l’échelle assez longtemps et nous apprenons à les connaître. Je n’idolâtre pas un cavalier en particulier mais ils ont leur nom tout en restant humbles, abordables, bienveillants et souriants. Si jamais je les croise sur une reconnaissance, je peux leur demander conseil si j’ai un doute pour une combinaison. Le rapport à l’argent et l’argent en jeu sont également moins présents dans notre discipline que celle du saut d’obstacles par exemple. Les mentalités restent alors plus saines. Le Concours Complet est une grande famille, que ce soit en compétition ou à l’extérieur, l’ambiance est géniale !

Avec Saga du ManaouIFCE, Héloïse Le Guern a participé aux championnats d'Europe Jeune Cavaliers en 2018 à Fontainebleau – ph. Alexandre
Avec Saga du Manaou*IFCE, Héloïse Le Guern a participé aux championnats d’Europe Jeunes Cavaliers en 2018 à Fontainebleau – ph. Alexandre

P.A : Suite aux tragiques événements qu’a connu le Concours Complet en 2019, la discipline cherche à se sécuriser davantage. Par quoi faudrait-il commencer d’après toi ?
H.L.G : Sécuriser le cross d’un Concours Complet est un dilemme, là est tout le problème. Je pense que minimiser les risques sur un parcours de cross veut dire qu’ils vont perdre de leur saveur, ce pourquoi nous faisons cette discipline. Il ne faut pas qu’on ait l’impression de sauter de l’hippique sur de l’herbe. Nous n’en sommes pas là bien sûr mais nous pourrions y arriver petit à petit. Je comprends et il ne faudrait pas aller à l’inverse non plus, il faudra accepter que ce n’est plus le cross d’avant. Le plaisir ne sera plus le même, mais il faudra sauter avec plus de sécurité et ne plus passer de gros obstacles à l’ancienne. Nous savons tous lorsque nous courons un cross que c’est risqué. Nous avons tous envie de pousser notre discipline en la médiatisant mais pas en mettant en avant des accidents justement. Alors, il vaut mieux aller vers du mobile avec des obstacles sécurisés en jouant peut-être plus sur la technique. Mais, il ne faut pas oublier qu’un accident peut aussi arriver sur un obstacle simple là où on ne pensait pas qu’il pouvait poser problème. Ça l’est déjà mais monter un parcours de cross est un sacré casse-tête pour les chefs de piste ! Innover et sécuriser tout en gardant l’esprit du cross est compliqué. Au niveau de l’équipement, je suis l’une des seules à ne pas encore avoir un Air Bag. J’ai tout de même le protège dos RXR. Je me sens tout de même bien avec, j’ai pu le tester avec quelques chutes et j’étais très bien protégée ! Lorsqu’on m’a posé la question, soit l’un soit l’autre, c’est vrai que la question financière a été la première. Mais, si j’avais à choisir aujourd’hui, je pense que j’irais vers un Air Bag bien qu’il ne soit pas efficace pour toutes les chutes. La sécurisé coûte de l’argent, c’est normal, c’est une technologie indispensable ! Les marques cherchent chaque jour à innover pour que les cavaliers soient au maximum sécurisé.

Propos recueillis par Léa Tchilinguirian.