Retour à la liste d'articles Article du 14/08/2023

L’élevage des Mauvis : cinquante ans de souvenirs !

« L’élevage de poneys ? Vous savez, ça remonte à quelques années… ». Cinquante-cinq ans pour la première Shetland achetée, un petit peu moins pour les poneys New Forest. En effet ! « Mon mari a 78 ans et j’en ai bientôt 83 ! Nous ne nous souvenons pas de tout, la mémoire peut nous faire défaut, mais cela nous fait très plaisir d’en parler et de nous remémorer ces bons souvenirs », poursuit Annie d’Aprigny, fondatrice, avec son mari Jean-Marcel, de l’élevage des Mauvis à Torigny-les-Villes, non loin de Saint-Lô en Normandie. Membres actifs de l’Association française du poney New Forest dans les années 80, naisseurs d’environ quatre-vingt poneys, ils ont également importé au cours de cette décennie plusieurs poulinières et étalons de Grande-Bretagne. Remontons le temps avec eux.

D’où vient cette passion pour le poney et l’élevage ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Je suis né avec un poney à la maison ! Mon père avait un demi-sang qu’il attelait, quand j’étais jeune adolescent j’avais une ânesse que j’attelais également, et un bouc qui faisait un peu de reproduction. J’ai toujours aimé ça !

Rodlease April Glory suitée de Falco des Mauvis avec Jean-Marcel d'Aprigny. Photo prise lors du concours inter régional des poulinières suitées du Normandie Horse Show de Saint-Lô en 1993
Rodlease April Glory suitée de Falco des Mauvis avec Jean-Marcel d’Aprigny. Photo prise lors du concours inter régional des poulinières suitées du Normandie Horse Show de Saint-Lô en 1993 – ph. coll. Elevage des Mauvis

Etiez-vous issus de parents éleveurs de poneys ou chevaux ?
Annie d’Aprigny : Non pas du tout. Jean-Marcel, qui travaillait chez Elle & Vire, a toujours voulu faire ça. Moi, je me suis dit « pourquoi ne pas apprendre ? ». Alors j’ai appris à conduire un tracteur et à traire (madame d’Aprigny était secrétaire à Saint-Lô chez l’architecte en chef des monuments historiques, ndlr)… La ferme était à quatre kilomètres de notre habitation, à Torigny-les-Villes, et on y allait comme les gens vont au bureau !

Pouvez-vous revenir sur les débuts de votre élevage ?
Annie d’Aprigny : Nous avons débuté l’élevage avec des poulinières et un étalon Shetland. Notre premier poney a été acheté en 1968, c’était une ponette Shetland, gratteuse et avec une tête de cheval ! Ensuite, nous avons eu des Dartmoor (d’où notamment l’étalon Fury des Mauvis, ndlr) car monsieur de Pas avait écrit un livre sur les races de poneys et celle-ci avait retenue toute notre attention (Louis de Pas est l’un des pionniers du mouvement de l’équitation poney en France. Il a notamment créé le Poney-club de Bois Guilbert en 1965, ndlr). Ni une ni deux, nous sommes partis en Angleterre ! Mon anglais scolaire n’était pas terrible mais on s’est débrouillés [rire]. Sans trop nous y connaître, nous avons acheté quelques Dartmoor. Nous en avons eu jusqu’à une vingtaine, mais en définitive ils ne se vendaient pas très bien car trop petits. Il y avait pas mal de New Forest dans la Manche, alors nous nous sommes tournés vers cette race. Je me rappelle que Jean-François Delaval importait à l’époque beaucoup de New Forest de la forêt. Lors d’un voyage, il a perdu, nous a-t-il dit, tous les livrets de ses poneys. Il a donc vendu par chez nous plusieurs New Forest qui n’avaient pas de papiers. À l’époque, l’Association du Poney Français de Selle – les PFS n’étaient pas aussi nombreux qu’aujourd’hui – accueillait les New Forest sans papier moyennant un examen. C’est comme ça qu’il y a eu ici des New Forest inscrits à titre initial PFS.

Y avait-il des poneys connus parmi eux ?
Je ne sais plus…

La poulinière britannique Willoway Tikka
La poulinière britannique Willoway Tikka – ph. coll. Elevage des Mauvis

C’est ainsi que votre élevage de poneys New Forest a donc vu le jour…
Annie d’Aprigny : Oui, dans les années 80. Au début, nous ne les avons pas trouvés très beaux [rire] ! Il y avait pas mal de poneys qui se grattaient et ils avaient une tête lourde. Alors nous sommes repartis en Angleterre ! On est allés dans le berceau de race et effectivement nous avons vu autre chose, notamment les concours d’élevage qui étaient de véritables concours de beauté… Dans les années 80, je suis entrée au bureau de l’association du poney New Forest (et à celui de l’association des poneys de Normandie) et je suis allée à des réunions jusqu’à Pompadour. Nous avons arrêté les Dartmoor (nous avons fait quelques croisements entre New Forest et Dartmoor, d’ailleurs). On avait des étalons à la maison et il nous arrivait d’avoir une vingtaine de poulinières visiteuses pour être saillies. Entre l’élevage et la ferme laitière (trente-cinq vaches laitières), il y avait du boulot !

En Grande-Bretagne, vous êtes donc tombés sur des poneys totalement différents ?
Annie d’Aprigny : Oui, ils étaient beaucoup plus beaux. Nous avons quand même acheté à monsieur Berthelemy du Bucq (co-fondateur et président de l’AFPNF pendant plus de vingt ans, et à la tête de l’élevage du Galion, ndlr) l’étalon [britannique] Lavender Stardust Of Wooton qui avait tout à fait ce type-là et à madame de Bonnafos un jeune mâle de 2 ans, Toléran des Étangs, qui est devenu par la suite étalon. La plupart de nos juments ont été acquises en 1987 ou 1988. Nous sommes allés en Angleterre plusieurs années de suite et nous ramenions à chaque fois un camion de poneys ! Je me rappelle que madame Large (*), de l’élevage Willoway, nous a livré nos poneys en 1988 avant le concours New Forest de Saint-James. Avec l’une de ses employées, elle nous a toiletté tous nos poneys ! On a fait une véritable razzia et Lavender Stardust Of Wooton a été sacré champion suprême ! Elle nous a appris à coudre les nattes au lieu de mettre des élastiques. Les poneys étaient magnifiques.

(*) Maria Large, fondatrice du Willoway Stud, a élevé pas loin de 300 poneys dont le premier né en 1981.
De l’élevage Willoway, Annie et Jean-Marcel d’Aprigny ont notamment importé Willoway Tikka et Willoway Nightime. Ces deux juments New Forest deviendront les poulinières phares de l’élevage des Mauvis. Tikka (née en 1994, par Peveril Peppercorn et Willoway Piper’s Pride par Peveril Peter Piper) est la mère de huit produits indicés en sport, dont Milord (par East End Breezer, père d’une vingtaine de poulains nés pour le compte de l’élevage des Mauvis entre 1999 et 2003) et l’européen en concours complet Régent des Mauvis (par Kantje’s Ronaldo SL). Nightime (née en 1987, par Peveril Peter Piper et Wootton Firelight – la mère de Willoway Piper’s Pride – par Oakley Firelight) est la mère de quatorze produits estampillés « des Mauvis » dont Histoir (par Maytree Sultan), championne des femelles de 3 ans au National de Lamotte-Beuvron en 1998, Gadget (par Lavender Stardust Of Wooton), IPO 141 / IPC 125, Jackson (Cs, par Guile Rock, Ps), IPO 146, Quidam (Pfs, par Garnement la Brée, Wd), IPO 122, Roxane (par Kantje’s Ronaldo SL), IPO 136, Uriane (par Marnehoeve’s Everest), IPO 125…
Cité à plusieurs reprises, notons que Peveril Peter Piper (Queenswood Solomon x Bridgelea Candy Cane), élevé par Betty Haycock, est l’étalon fondateur du Willoway Stud. Il fut un père très influent pour la race, en Grande-Bretagne.

Avec le temps, on imagine que vous avez noué de belles amitiés avec les éleveurs britanniques ?
Annie d’Aprigny : Nous nous sommes faits des amis parmi eux, oui, comme par exemple Harvey Richards. Nous étions invités chez eux et introduits partout. Nous nous sommes rendus à leur National New Forest, c’était quelque chose ! À la tête des élevages, il y avait d’ailleurs très souvent des femmes. Elles conduisaient elles-mêmes les camions, faisaient ensemble des carrousels même si parfois elles étaient âgées. Elles n’avaient peur de rien ! Il y avait tout un fossé entre l’univers français et le leur. Et puis quand nous participions à nos concours, à Bourges ou à Tours notamment, nous faisions déjà venir des juges anglais. Le jugement se faisait « à la pancarte », entre un représentant du haras qui donnait une note et la juge anglaise.

Willoway Nightime suitée d'une pouliche de Cactus du Vast
Willoway Nightime suitée d’une pouliche de Cactus du Vast – ph. coll. Elevage des Mauvis

Qu’est-ce qui vous a le plus plu ou marqué en Angleterre avec les poneys New Forest ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Le sérieux des éleveurs. Ils n’étaient pas comme nous – qui allions au plus près pour ne pas dépenser –, eux, ils cherchaient des étalons qui correspondaient à leurs juments. C’était leur vie, de toute façon. Quand nous sommes allés à Lyndurst pour le concours New Forest, il y avait une étendue de vingt-cinq ou trente hectares, c’était un concours de poneys bien sûr mais il y avait d’autres animaux, ainsi qu’un concours du plus beau bouquet, du gâteau le plus joli ; en France on ne faisait pas ça. C’était un vrai spectacle ! Ce qui nous a beaucoup plu aussi c’était de voir de tout petits enfants sur des poneys tenus par leurs mères ; l’enfant et la mère étaient habillés pareil. Il y avait aussi de magnifiques attelages. Il faut aller voir ça une fois dans sa vie. C’est leur truc, leur culture ! Les concours de show et d’élevage étaient impressionnants.

Quels ont été vos premières juments phares ?
Annie d’Aprigny : Rodlease April Glory, l’une de nos premières juments achetées en Angleterre. Son éleveuse l’aurait gardée – car elle était très belle – si elle ne s’était pas montrée difficile. En fait, elle n’aimait pas qu’on l’attrape, alors elle l’a vendue… à des français [rire]. Elle avait 2 ans lorsque nous l’avons récupérée. Elle a fait des poulains avec Maytree Sultan (d’où l’étalon Gédéon des Mauvis), Knightwood Camelot (d’où l’étalon Jeans des Mauvis), nous a donné Piccolo (par le poney de selle Welsh néerlandais Teake It Easy SL que le couple d’Aprigny affectionne tout particulièrement, ndlr), Querida (par Kantje’s Ronaldo SL) qui est désormais poulinière chez Amélie Dubourg… Et puis nous avons eu nos « Willoway », Tikka et Nightime. C’était un très bon élevage doté d’une centaine de poneys ! La famille Large élevait très bien, mais nous (Français) avions beaucoup de mal à acheter des bons poneys ! Elle nous a vendu Tikka et comme nous étions une semaine en Angleterre on lui a dit « si vous voulez, vous pouvez l’engager au concours », et on l’a battue ! [rire].

Quelques poulinières britanniques ayant fait une carrière de reproductrice à l’élevage des Mauvis :
Willoway Tikka et Willoway Nightime citées plus haut
Rodlease April Glory (née en 1988 chez Mlle A. Darnton, par Luckington Ludo et Katric Crowning Glory par Holly Prince Rupert) a donné pour le compte de l’élevage des Mauvis les étalons Falco (par Hurstfield Charleston), vice-champion des 4 ans D de CSO en 1997 (IPO 128) et acheté par les Haras Nationaux, Jeans (par Knightwood Camelot), champion des mâles de 2 ans au National de Lamotte-Beuvron en 1999 et vice-champion des 3 ans, champion des 5 ans D en CSO, IPO 132, et Gédéon (par Maytree Sultan), vice-champion des mâles de 1 an au National de Tours en 1995, 4e au National des 3 ans montés, sorti en D1 de CSO et jusqu’en Grand Prix de CCE, IPO 149 / IPC 139 (son propre frère, l’étalon Helios des Mauvis, est également indicé, 134 en saut d’obstacles), mais aussi les poulinières Kitsch (par Silverlea Simply Red), IPO 153, qui produit pour l’élevage « de Tushita », Myrtille (par East End Breezer), IPO 128 , Querida (par Kantje’s Ronaldo SL), IPO 124, et son propre frère Rafale (Hunter en Californie). Notons encore que dix-huit des soixante-huit produits de Gédéon des Mauvis sont indicés à plus de 120 (Osiris d’Arquetan, IPC 147, Pennybell d’Arquetan, IPC 123 / IPO 147…). Rodlease April Glory est également une sœur utérine de Rodlease Morning Glory, la mère de l’étalon Mastwood Blackberry qui a participé aux championnats d’Europe de dressage pour l’Italie et le Luxembourg.
Knightwood Cassandra Of H (née en 1983 chez Harvey Richards, par le chef de race Deeracres Franco et Canfield May Maryon par Knightwood Spitfire), importée à la fin des années 80, est la mère de Danuta des Mauvis (elle-même mère du vice-champion des mâles de 2 ans Igloo de la Mercerie), Hidalgo des Mauvis (par Maytree Sultan), indicé 138 en CSO et 132 en CCE avant son départ à l’élevage de Civry de Geneviève Tréheux (d’où Kassandra de Civry, par Silverlea Simply Red, IPO 143 / IPC 136). Elle a aussi produit Basia des Mauvis (par Knightwood Dragonfly), poulinière à l’élevage du Poët (d’où Gazelle du Poët, IPO 137 et Holywood du Poët, IPO 122 / IPC 121). Sa première pouliche Britannique enregistrée en France, Knightwood Priscilla, s’est classée au National New Forest.
Stafford Fiesta (née en 1987 chez Mme P.c. Baillie, par Deeracres Franco et Stafford Chocolate Box par Bridgelea Candy Cane) a produit Harmony des Mauvis (par Maytree Sultan), 3e de la classe des pouliches de 2 ans au National de Tours en 1997, Erky des Mauvis (par Toléran des Étangs), 6e du championnat de France D2 Élite de CSO en 1999, IPO 147, et Korrigan des Mauvis (par Silverlea Simply Red), IPO 125.
Amazing Grace Of Vernons (née en 1986 chez Mme Lee, par Vernons Vespers et Merrie Myrrh par Merrie Mercury) est la mère de deux poneys New Forest « des Mauvis » et de la petite PFS Geisha des Mauvis (par l’Anglo-Arabe Vis Versa), formidable compétitrice, classée notamment 4e du championnat de France C1 de CSO en 2001 (IPO 156).
Farriers Fair Maid (femelle née en 2004 chez M. S. Young, par Farriers Fair Chance et Brock Beth par Beechwood Comet) a produit plus récemment quatre poulains pour la famille d’Aprigny avant d’intégrer l’élevage « Du’O ».

La poulinière Tiba des Étangs
La poulinière Tiba des Étangs – ph. coll. Elevage des Mauvis

Parmi les poulinières françaises, citons :
Recia du Galion (née en 1983 chez Jean-Pierre Berthelemy du Bucq, par Fijal Soloist et Dream of Ashurst par Brookshill Barleycorn) est la mère de l’étalon Dandy des Mauvis (par Toléran des Étangs), 3e des mâles de 3 ans au National de Bourges en 1994 et père de 251 produits. Recia a notamment produit Equinox des Mauvis (par Toléran des Étangs), sacré vice-champion des mâles de 2 ans au National de Bourges en 1994 (derrière Étoile d’Hardy qui remporta cette année-là le titre de champion suprême).
Tiba des Étangs (née en 1985 chez Hélène de Bonnafos, par Jolly des Ifs et Priory Rosalind par Priory Top Hat) a eu dix poulains tous nés sous l’affixe « des Mauvis », dont Djebel (par Lavender Stardust Of Wooton), 5e de la finale des 5 ans C de CSO en 1996, ainsi que ses propres sœurs Ester (vice-championne des femelles de 3 ans au National de Tours en 1995, également mère de Java de St Barth, 3e des pouliches de 3 ans au National de Lamotte-Beuvron, de l’étalon Pfs Osiris de St Barth et de Kachemire de St Barth, IPO 136) et Flanelle (vice-championne des femelles de 2 ans au National de Tours en 1995), mais aussi Hunelle (par Maytree Sultan), vice-championne des femelles de 3 ans au National de Lamotte-Beuvron en 1998, IPO 125, et sa propre sœur Grenelle (mère de Las Vegas du Poët, IPO 126, Palm Beach, IPC 122, Tilbury du Poët, IPO 135, Vanoise du Poët, IPO 135, Dolce Vita du Poët, IPO 121 / IPC 135, ou encore la poulinière Midway du Poët, mère notamment de Tazz du Poët, IPO 155 / IPD 133 / IPC 142)…
Reine des Prés Ter (née en 1983 chez Michel Bertrand, par Joker de Tyv et Flicka du Galion par Oakley Poseidon, un autre étalon importé en 1969 par Jean-Pierre Berthelemy du Bucq) est la mère de trois poulains à l’élevage des Mauvis, dont Bachus cité précédemment.

Vous avez acheté des poneys de l’élevage Willoway, avez-vous eu des poneys « Silverlea » ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Non, ce n’était pas le type qui nous plaisait. Par contre, on a visité l’élevage ! On a été partout (et avons été reçus pour déjeuner ou dîner, on s’est parfois même demandé si l’escalope de veau n’était pas du carton bouilli [rire]) ! C’était un très bon élevage. Lorsqu’on est allés le visiter, on nous a emmenés en voiture, et nous avons vu des mâts de bateaux tout au bord, dans le champ, s’enfoncer : dans ces champs-là il y avait des buttes, sur lesquelles les poneys montaient à chaque marée car tout était envahi par l’eau ; et il y avait un canal à côté. On se demandait comment c’était possible !

Quels étalons ont fait la monte chez vous ?
Annie d’Aprigny : Lavender Stardust Of Wooton et Toléran des Étangs pendant plusieurs années, mais aussi Maytree Sultan. Si Lavender Stardust Of Wooton était un étalon indépendant – nous ne l’intéressions pas beaucoup –, Toléran était très proche de l’homme : à chaque fois que nous passions à côté de son box, il fallait qu’on le caresse. Je crois me rappeler que l’éleveuse de Maytree Sultan allait chercher ses commissions en Rolls-Royce [rire]. Nous avons importé quelques étalons aussi : Knightwood Camelot (9e de la finale des 4 ans de CSO en 1994, puis 4e des 5 ans C l’année suivante, ndlr), Hurstfield Charleston (2e du concours de Lyndurst à 2 ans, vendu aux HN, ndlr), East End Breezer (introduit en France en 1998, ndlr), Woodrow Choir Master (importé à 1 an, il fut d’ailleurs le gagnant des mâles de 1 an au National de Tours en 1996, ndlr), acheté à 3 ans par Nathalie Gravier de l’élevage du Poët…

Epi, fils de l'étalon Toléran des Etangs, sous la selle de l'Allemand Patrick Stühlmeyer lors de la finale individuelle des championnats d'Europe de CSO à Saumur en 2006 - ph. Poney As
Epi, fils de l’étalon Toléran des Etangs, sous la selle de l’Allemand Patrick Stühlmeyer lors de la finale individuelle des championnats d’Europe de CSO à Saumur en 2006 – ph. Poney As

Parmi les étalons :
Toléran des Étangs (né en 1985, par Jolly des Ifs et Cherry IV par Deeracres Springtime) fait référence à l’élevage « des Étangs » de la baronne de Bonnafos. Il compte cent quinze produits enregistrés en France dont une première génération née en 1990. Le premier produit de Toléran portant l’affixe « des Mauvis » est Chester, un fils hongre de la poulinière britannique Knightwood Cassandra Of H (par Deeracres Franco). La moitié de sa production est sortie en compétition et nous nous rappelons d’Espoir de la Bigne (Pfs, mais aux trois quarts New Forest puisque son grand-père est Obélisque, le fils de Cheriton Mr.Fluff IV et de la célèbre Fée), classé 8e du championnat de France Grand Prix Élite de CSO en 2003 sous la selle de Marie Mabille. En sport, son porte-drapeau est inévitablement Épi, un formidable poney New Forest qui appartenait à l’époque à Rene Tebbel et remarquablement monté par le pilote allemand Patrick Stühlmeyer aux championnats d’Europe de Saumur en 2006 (médaillés d’argent par équipes et 4e en individuel, les deux ne faisaient couple que depuis trois mois !). Parmi les fils étalons de Toléran, citons Freesia des Bois (IPO 131) et Dandy des Mauvis (père d’Haïti de la Mercerie, vice-champion de France des mâles de 1 an et de 2 ans). Sa fille Duchesse du Bisson fut bien classée au National New Forest (notamment 3e des femelles de 3 ans en 1994).
Lavender Stardust Of Wooton (né en 1982 chez Mme J. Hawke, par Wootton Starflight et Lavender Lunar Lass par le chef de race Burton Starlight) fut importé par Jean-Pierre Berthelemy du Bucq. Ses premiers produits nés à l’élevage des Mauvis sont Banjo (par Recia du Galion), sorti dans les trois disciplines olympiques, et Bacchus (par la poulinière Reine des Prés Ter, fille de Joker de Tyv), indicé 127 en CSO. Lavender Stardust Of Wooton a également donné onze étalons dont Vent, Vault – respectivement champion et vice-champion des mâles de 1 an au National de 1988, puis premier et 3e l’année suivante – et Able, tous les trois nés sous l’affixe « du Galion », Boris IV (vice-champion des mâles de 3 ans au National de Bourges en 1992, IPO 120), Beau Prince (3e des mâles de 2 ans au National de Bourges en 1991), Cosmos de l’Aumont (champion des mâles de 1 an au National de Bourges en 1991 et réserve champion mâle, 3e des mâles de 2 ans l’année suivante), Calin de la Lande (champion de France aptitude sport, 7e du championnat de France D2 Élite de CCE en 1997 et 12e en CSO, ICC 137 / IPC 152), Cactus du Vast (3e des mâles de 1 an au National de Bourges en 1991), Duc de la Gaule et Géronimo du Faÿ (3e des mâles de 3 ans au National de Tours en 1997). Ses produits se sont illustrés au National New Forest, notamment à Bourges en 1991.
Maytree Sultan (né en 1988 chez M. D.w. Adams, par Frankincense Of Vernons et Beechwood Tsarina par Oakley Jonathan III) est le père de cent trente-neuf poneys enregistrés en France. À l’élevage des Mauvis, les premiers sont ceux de la génération 1994, Grenele (poulinière citée plus haut), Grafiti indicée dans les trois disciplines, et l’étalon Gédéon (cité plus haut également). Il compte vingt produits indicés à plus de 120 dont les New Forest Hyacinthe du Vent (IPD 156), Jais des Bohons (IPO 143) et Kookaï de Bedou (IPC 140).

Les poneys nés chez vous étaient-ils destinés au sport, au loisir ? Quel était votre objectif ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Ils étaient plutôt destinés au loisir. Pour faire de la compétition aussi quand même, mais le but était qu’ils soient montés par des enfants. On n’a pas cherché à acquérir ou à faire naître des poneys de Grand Prix. Nous voulions avoir des poneys avec de bonnes origines, des lignées qui ont plus de capacité peut-être à l’obstacle, mais rien n’était gagné d’avance. Nous n’avons jamais fait de l’élevage pour gagner et gagner, notre truc c’était de voir arriver le petit poulain avec le croisement des reproducteurs que nous avions choisis.

Élevez-vous encore un peu, et, si oui, avec quelles poulinières ?
Annie d’Aprigny : Mon mari n’a plus que trois juments dont une New Forest : Akila des Mauvis (par Rambo SL et Farriers Fair Maid par Farriers Fair Chance). Nous avons également une fille de notre Rodlease April Glory, nommée Tequila des Mauvis (Pfs, par Melvin Candy), et Vanille des Herbages (Pfs, par Quabar des Monceaux et Nitro des Herbages par Island de l’Aumont, un descendant de la New Forest Soon des Étangs. Rodlease April Glory et Soon des Étangs se sont d’ailleurs livrées à des « luttes acharnées » lors des concours d’élevage régionaux ou nationaux de l’époque, se souvient l’ancien président de l’AFPNF Olivier Despierres, ndlr) née chez Philippe Rainteau. Nous avons encore quelques champs, sur trois hectares. On en avait beaucoup plus par le passé, les poneys traversaient l’eau et avait un petit bois. Avant, on ne vendait nos poneys qu’à partir de 3 ans généralement, et débourrés. Maintenant ils partent poulains, souvent à des cavaliers qui veulent les travailler puis les vendre. C’est pratique pour nous car nous n’en avons pas beaucoup à la maison. S’ils ne sont pas vendus poulains, nous les confions à notre cavalière Julie Briand pour le débourrage. Notre deuxième fille, qui a le second degré, professeur de SVT aujourd’hui, a son petit élevage dans le nord du Cotentin. Ses poneys viennent de chez nous et elle utilise l’affixe des Mauvis.

La britannique Rodlease April Glory considérée par Annie et Jean-Marcel d'Aprigny comme la meilleure poulinière de l'élevage des Mauvis
La britannique Rodlease April Glory considérée par Annie et Jean-Marcel d’Aprigny comme la meilleure poulinière de l’élevage des Mauvis – ph. coll. Elevage des Mauvis

Vous êtes donc passés au croisement, quelle est la raison ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Nous préférons la monte en main et nous n’avons pas trouvé d’étalons New Forest à côté de chez nous. Je ne souhaite pas faire trop de kilomètres, et en insémination les chances ne sont pas les mêmes et cela coûte cher, il faudrait voir… À la présentation des étalons à Saint-Lô, je regarde toujours s’il y a des New Forest qui me plaisent. On a tous un type de poneys qui nous plaît !

Quel est le type New Forest idéal pour vous ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Ceux avec une tête élégante, un peu arabisée, très sport, plaisant, un poney que vous remarquez quand vous entrez dans le champ. D’ailleurs, Lavender Stardust Of Wooton avait un peu cette tête-là ! Un élevage de New Forest nous plaisait beaucoup en Angleterre par rapport au modèle des poneys, c’était Peveril. On a vendu un poney il y a quelques temps, Kash des Mauvis (Pfs, par l’étalon de selle néerlandais Cordo H et Tequila), qui a vraiment beaucoup de cachet.

S’il y avait eu des étalons New Forest un peu plus près de chez vous, auriez-vous continué à faire naître en race pure ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Bien sûr ! Si j’en trouve un, je lui confierai ma ponette New Forest.

Vous avez suivi de nombreuses éditions du National New Forest, pouvez-vous nous en dire deux mots ?
Annie d’Aprigny : Quand nous avons débuté l’élevage de poneys New Forest, le président était Jean-Pierre Berthelemy du Bucq. C’était un rassembleur, quand il faisait le National, il nous contactait tout le temps, c’était son truc rassembler. Jean Mellet (élevage des Rouets, ndlr), le secrétaire, s’occupait de beaucoup de choses. À l’époque, il devait y avoir une centaine d’éleveurs. Quand nous participions au National, comme à Tours pendant plusieurs années (ou à Bourges, ça faisait de la route !), on descendait avec un camion plein, nous avions une dizaine de poneys. On a dû suivre cette manifestation jusqu’à ce qu’on arrête la ferme, il y a donc un certain temps. Nous n’avons jamais engagé de poneys au National de Lamotte-Beuvron par exemple, nous sommes allés en Sologne simplement en visiteurs pour aller voir notre petite-fille (le couple d’Aprigny a trois enfants, ndlr) qui montait un poney de chez nous. Et puis quand on vieillit, on ne participe plus aux concours, on s’éloigne de tout… On est content lorsqu’on apprend que nos poneys gagnent ou s’illustrent sur un concours. Il y a quelques jours encore, une dame a remporté un régional avec une 3 ans née chez nous (la PFS Kimba des Mauvis, fille de Boston des Londes et Vanille des Herbages). Elle va aller au Sologn’Pony de Fontainebleau, il y aura encore quelques poneys des Mauvis sur ce rassemblement !

Les succès de l’élevage des Mauvis au National, en quelques lignes :
Willoway Nightime, gagnante de la classe des pouliches de 1 an au National de Saint-James en 1988, fut 2e à 2 ans en 1989, toujours à Saint-James, et 2e à 3 ans, à Tours.
Amazing Grace Of Vernons a remporté la classe des pouliches de 2 ans au National de Saint-James en 1988 et le championnat des femelles.
Toléran des Étangs a gagné la classe des mâles de 3 ans au National de Saint-James en 1988.
Lavender Stardust Of Wooton a remporté la classe des étalons au National de Saint-James en 1988, puis le championnat des mâles. L’année suivante, il s’est classé 2e de cette classe. En 1994, à Bourges, il est troisième.
Recia du Galion est la gagnante de la classe des poulinières suitées au National de Saint-James en 1989 (devant Soon des Étangs).
– Cette même année (1989), présentée par leur fille Sophie, Tu Es Belle II (née chez Michel Bertrand, par Joker de Tyv et Flicka du Galion par Oakley Poseidon) a été sacrée championne des poulinières non suitées. Cette jument a donné une femelle à l’élevage des Mauvis nommée Camélia (elle-même mère de la New Forest Kaline de la Mare, par Glen de l’Aumont, IPO 144 / IPC 138).
Rodlease April Glory a remporté la classe des pouliches de 2 ans au National de Tours en 1990 puis fut sacrée championne des femelles. L’année suivante, à 3 ans, elle fut couronnée au National de Bourges avant d’être sacrée réserve championne femelle. En 1996, à Tours, elle fut sacrée championne des poulinières non suitées.
Knightwood Cassandra fut championne des poulinières suitées au National de Bourges en 1991 devant Recia du Galion !
Willoway Tikka fut vice-championne des pouliches de 2 ans au National de Tours en 1996 avant de remporter le titre, à 3 ans, l’année suivante.
Stafford Fiesta s’est classée 3e de la classe des poulinières non suitées au National de Tours en 1997.

Un poney né chez vous vous a-t-il marqué plus qu’un autre ?
Annie d’Aprigny : Celui qui a été médaillé aux championnats d’Europe, Régent des Mauvis (*). Les poulinières nous ont marquées également, je pense par exemple à April Glory qui a été, je pense, notre meilleure poulinière. On a eu aussi des poneys qui nous plaisait par leur beauté ou leur caractère adorable. Certaines juments sont mortes chez nous à un âge avancé, elles avaient tellement bien reproduit et nous avait tellement fait plaisir que nous n’avons pas voulu nous en séparer. Nos juments ne faisaient d’ailleurs pas des poulains tous les ans.

(*) Régent des Mauvis (par Kantje’s Ronaldo SL et Willoway Tikka par Peveril Peppercorn) fut médaillé de bronze par équipes aux championnats d’Europe de concours complet de Fontainebleau en 2012, monté par la Néerlandaise Joyce van de Kuilen. Toujours sous les couleurs « oranje », le petit noir s’est classé 7e par équipes lors de l’échéance d’Aarhus Vilhelmsborg avec Mara van de Ven. Représentant de l’équipe d’Irlande ensuite, il fit bonne figure aux championnats d’Europe de Bishop Burton en 2018, se classant 9e en individuel sous la selle d’Ava Banahan.

Les naissances de poneys New Forest ont considérablement baissé par rapport aux années 80 / 90. Que pensez-vous de ce constat ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Peut-être est-ce dû au fait de mésententes avec des éleveurs et des présidents ou membres du bureau, et puis je pense que ce n’était plus le poney recherché. Je crois que nous avons gardé un type de poney ancien et c’est ce poney-là qui ne collait plus au marché. Il faudrait arriver à avoir une certaine catégorie de poneys plus légers et élégants. Geneviève Tréheux, de l’élevage de Civry, un très bon élevage, a fait cette démarche. Ce que je reproche aux poneys New Forest, c’est leur encolure très large. Les juments New Forest sont un peu communes, mais elles ont de la qualité. Je pense qu’il faudrait trouver des étalons un tout petit peu plus légers, mais avec de la qualité toujours, comme Emmickhoven’s Diego SL (Kantje’s Ronaldo SL x Duke’s Forest Oberon). D’ailleurs, un autre étalon du Syndicat Linaro, Rambo (Diogenes Kay x Boy), a bien reproduit ; Akila est l’une de ses filles. Je n’aime pas le modèle de Ronaldo par exemple (son gros « cou »), mais je l’ai utilisé avec une poulinière qui se mariait bien avec lui et il a très bien produit. À l’élevage des Étoiles, chez Mathilde Doutressoulles, il y a Jumbo des Étoiles (Bovenheigraaf’s Camillo x Karisto de l’Aumont) qui est joli ; on va voir ce qu’il va donner, il est sorti en compétition cette année. Les New Forest ont plein de qualités !

Régent des Mauvis et l’Irlandaise Ava Banahan sur le cross européen de Bishop Burton en 2018 – ph. Poney As
Régent des Mauvis et l’Irlandaise Ava Banahan sur le cross européen de Bishop Burton en 2018 – ph. Poney As

Quelles qualités par exemple ?
Jean-Marcel d’Aprigny : Le caractère, c’est une certitude. Ils sont très gentils ! Ils sont aussi faciles à croiser, malheureusement pour le stud-book et heureusement pour les autres. Ils sont également rustiques.

Que retenez-vous tout particulièrement de vos poneys New Forest ?
Annie d’Aprigny : Ils ont toujours été très gentils, nous n’avons jamais eu d’accidents, jamais nous n’avons été mordus ni bottés. Tous nos poneys ont toujours été bien ensemble. Nous n’avons jamais eu de poneys difficiles ; d’ailleurs les poneys New Forest ont toujours été faciles bien que cela vienne de la manière dont on les traite. Mon mari va les voir le matin et le soir. Le matin, il y reste un bon moment, il leur donne les granulés, leur raconte des histoires [rire], les brosse…

Merci pour cet échange !
Annie d’Aprigny : Merci à vous, cela nous fait resurgir des souvenirs qu’on avait oubliés et c’est bien agréable !

Propos recueillis par Pauline Bernuchon

L’association française du poney New Forest vous donne rendez-vous le samedi 19 août 2023 lors du Sologn’Pony à Fontainebleau, à l’occasion du National de race.

 

Willoway Tikka - ph. coll. Elevage des Mauvis
La poulinière Willoway Tikka
L'étalon Toléran des Etangs - ph. coll. privée
L'étalon Toléran des Etangs
La poulinière Farriers Fair Maid suitée d'un poulain de Rambo SL - ph. coll. Elevage des Mauvis
La poulinière Farriers Fair Maid suitée d'un poulain de Rambo SL
L'étalon Falco des Mauvis - ph. coll. privée
L'étalon Falco des Mauvis - ph. coll. privée
Régent des Mauvis et la Néerlandaise Joyce van de Kuilen aux championnats d'Europe de concours complet de Fontainebleau en 2012 – ph. Poney As
Régent des Mauvis et la Néerlandaise Joyce van de Kuilen aux championnats d'Europe de concours complet de Fontainebleau en 2012
Willoway Nightime - ph. coll. Elevage des Mauvis
La poulinière Willoway Nightime - ph. coll. Elevage des Mauvis
L'étalon Lavender Stardust Of Wooton - ph. coll. privée
L'étalon Lavender Stardust Of Wooton
Tu Es Belle II lors du National de Saint-James en 1989, présentée par Sophie d'Aprigny - ph. coll. Elevage des Mauvis
Tu Es Belle II lors du National de Saint-James en 1989, présentée par Sophie d'Aprigny
L'étalon Gédéon des Mauvis - ph.coll. privée
L'étalon Gédéon des Mauvis
L'étalon Hurstfield Charleston - ph. coll. HN
L'étalon Hurstfield Charleston
Mara van de Ven et Régent des Mauvis - ph. Poney As
Mara van de Ven et Régent des Mauvis
Querida des Mauvis - ph. coll. privée
Querida des Mauvis - ph. coll. privée