Retour à la liste d'articles Article du 28/07/2022

Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont : la construction d’un couple

Article publié dans le magazine Poney As de juillet. Depuis, Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont ont décroché une médaille d’or aux championnats de France Grand Prix As Poney Elite Excellence et une sélection pour l’échéance européenne de Strzegom.

Qui aurait pu prédire il y a quelques années la saison 2021-2022 d’Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont ? Sans doute pas la protagoniste, qui nous raconte ses débuts ponctués de doutes avec son poney. En lice aujourd’hui sur les pistes des CSIOP, Emma se dit que « ça valait le coup de s’accrocher ! ».

En 2022, Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont ont enchaîné les bonnes performances en Grand Prix et CSIOP – ph. Poney As
En 2022, Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont ont enchaîné les bonnes performances en Grand Prix et CSIOP – ph. Poney As

Entre Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont, il s’est passé quelque chose, ce « truc » qui fait que lorsqu’un cavalier et un poney sont véritablement en osmose, ils portent si bien le nom de « couple ».
S’ils enchaînent aujourd’hui les toutes bonnes performances avec la manière sur les plus belles pistes des Super As et CSIOP (Opglabbeek, Fontainebleau et Hagen), leurs débuts ont en revanche été compliqués. La jeune fille avait neuf ans lorsque son « Badou » a intégré son quotidien. Le joli bai en avait cinq. Bad Boy, né à l’élevage du Beau Mont chez Nicolas Delacour (50) – inscrit origines constatées (OC), fils du petit Léopard de Mahoud (performer en As Poney 2 C et D) et de la Selle Français Rafale du Marais (par Allegreto) – était en effet un brin… coquin !

Remise en question et travail

Lorsqu’Emma était toute petite, elle était associée à une ponette avec laquelle la complicité ne s’est jamais instaurée, « je tombais, sautais les barrières, rentrais dans les murs… », si bien qu’avec ses parents la décision fut prise « d’acquérir un poney pour que je me fasse enfin plaisir, sans avoir peur », raconte-t-elle.
Après un premier contact avec les éleveurs de Bad Boy, elle part l’essayer. « J’avais finalement le choix entre son frère et lui. Contrairement à Bad Boy qui était tout fin, son frère était très « mastoc » et j’ai eu un peu peur de le monter. J’ai donc essayé Bad Boy, et ça s’est plutôt bien passé, on a un peu sautillé ». En descendant de son jeune poney, il s’est surtout passé quelque chose dont la jeune fille, âgée de quinze ans aujourd’hui, se rappelle encore : « il m’a fait un signe de la tête, comme s’il me disait de le choisir, ça a été comme un déclic. Je ne parlais plus que de lui auprès de mes parents. Je suis allée essayer un autre poney, mais j’avais Bad Boy en tête. C’était lui : il m’avait fait ce signe ! ».

Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont au CSIOP de Fontainebleau – ph. Poney As
Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont au CSIOP de Fontainebleau – ph. Poney As

Emma part l’essayer de nouveau et l’engage même sur un petit concours, « une P2 où je suis éliminée… », ce qui n’entame en rien son coup de cœur du départ. La décision est prise et ses parents l’achètent.
« Mon grand-père est allé le chercher et nous l’a ramené (ses parents ne sont pas dans le milieu équestre, mais son grand-père, son frère et son oncle, par exemple, sont ou ont été jockeys, ndlr). J’ai commencé à le monter, mais il ne savait que galoper ! De mon côté, j’étais débutante… Je faisais mes petits parcours avec lui et j’étais contente ». Emma nous raconte que son poney ne sautait pas comme aujourd’hui, c’est-à-dire avec beaucoup de respect, une rehausse du garrot assez impressionnante et de la force lui permettant de compenser son geste de devant perfectible. « Il sautait un peu comme un mouton, pas très bien, mais avec moi sur le dos qui ne savait pas faire grand chose, c’était compliqué pour lui », avoue la cavalière en plaisantant.

Lors de son deuxième concours, une Poney 3, le couple passe la ligne d’arrivée. « C’était à Liverdy et j’avais demandé à une fille qu’elle le monte avant moi, et ça s’était bien passé puisqu’elle est sans faute et moi aussi ». Bouclée par un double sans-faute aux championnats de France, cette première année en P3 / P2 se passe plutôt bien.
Emma, qui s’entraîne au Haras de Maison Blanche (77), voit le départ de sa monitrice. Elle est remplacée par sa coach actuelle, Charlotte Filleux. L’année d’après, le chic « Badou » n’en fait qu’à sa guise… Un retournement de situation que sa cavalière a eu du mal à gérer. « Bad Boy a commencé à me faire tomber derrière le numéro 1 en concours… ! Je n’arrêtais pas de tomber à la détente, à la maison aussi… Il me donnait un coup de cul suivi d’un coup d’épaule et je n’arrivais pas à tenir. Il avait compris le truc et est devenu coquin ». Alors la cavalière n’hésite pas à accentuer le travail sur le plat et le dressage avec Agnès Toitot et Maella Belz Toitot qui lui donnent, en plus de Charlotte, de précieux conseils. Emma s’accorde à dire qu’ensuite, elle a commencé à « s’accrocher » !

Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont sur le parcours de la Coupe des nations du CSIOP de Fontainebleau – ph. Poney As
Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont sur le parcours de la Coupe des nations du CSIOP de Fontainebleau – ph. Poney As

« J’ai fait pas mal de P2, P1 et P Elite ». Une période marquée de doutes, encore, durant de longs mois, une année même. Il ne s’agit plus de chutes, mais de barres renversées ! « Pendant toute ma saison, je n’ai pas réalisé de parcours sans faute ! Parfois je sortais même en pleurant. C’était compliqué, car mon poney n’avait jamais sauté ça et moi non plus ». Pour l’aider à passer un cap avec son jeune poney, elle commence à travailler parallèlement avec Dorothée Amar (chez qui étaient ses deux juments avant leur installation chez Pauline Guignery, cf. encadré).

En 2019, le couple se classe 6e des championnats de France en Poney Elite. Il se déclenche et débute les As Poney 2 cette année-là, avant que le Covid ne fasse son apparition. Pour Emma et Bad Boy, cette période sans sorties s’avère finalement fructueuse, riche en séances de plat et de sauts. Les deux s’endurcissent, se comprennent de mieux en mieux ; leur complicité s’accentue. « J’ai pu m’entraîner encore plus souvent et cela nous a rapprochés, on s’est tous les deux métamorphosés. Le fait d’être tout le temps aux écuries, de le monter tous les jours et de beaucoup travailler avec ma coach nous a fait passer un vrai cap, cela a tout changé ! J’ai énormément progressé durant cette période ». Le tandem débute alors en As 1. Sa deuxième sortie dans cette série se déroule à l’Espace Rozier, en juillet 2020. L’entraîneuse d’Emma ne souhaite pas que Bad Boy saute durant ces trois jours de compétition ces hauteurs et difficultés, « mais il m’a encore fait tomber après le numéro 1 de l’As 2 ! Nous l’avons donc aussitôt engagé dans l’As 1. Il a finalement sauté les trois jours dans cette catégorie ! ». A la clé : un clear round, un parcours à 4 points et un autre tour « à oublier ».
Le couple se rode et, malgré le peu de sorties, la régularité est patente et les sans-fautes se multiplient. « Quand il a commencé à faire les As 1, puis les Grands Prix, ce n’était plus du tout le même… il est devenu magique ! », confie Emma.

Après Fontainebleau, Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont ont obtenu leur ticket pour le CSIOP d’Hagen en Allemagne – ph. Poney As
Après Fontainebleau, Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont ont obtenu leur ticket pour le CSIOP d’Hagen en Allemagne – ph. Poney As

Sur la route des Grands Prix

Juin 2021 est synonyme de premier Grand Prix, à l’Espace Rozier toujours. Trois barres sont à terre en passant la ligne d’arrivée de l’épreuve de vitesse. Le lendemain, c’est la victoire ; le couple ne commet pas la moindre faute ! En août, il confirme dans la vitesse et le Grand Prix As Excellence (4e) du Sologn’Pony. « C’est le concours qui a déclenché ma saison à haut niveau. Olivier Bost a commencé à nous repérer, je crois, à partir d’Equita Lyon quand nous avons gagné la vitesse et que nous nous sommes classés 2es du Grand Prix Super As. Après, j’ai fait un stage fédéral à Liverdy », indique-t-elle.
La saison indoor est néanmoins en demi-teinte : « Bad Boy était un peu bloqué. Les indoors restent compliqués pour lui, c’est un poney qui a besoin de s’exprimer, d’être libre. Dans le manège de Saint-Lô, en janvier, il commençait vraiment à ne pas bien sauter, il était vite à la faute, il n’était plus démonstratif. Le premier concours à l’extérieur était Jardy. Je savais qu’en reprenant les pistes extérieures, il allait être super. Nous sortons 2es les deux jours ! Il était génial, expressif, je l’avais retrouvé ! ».

Un premier CSIOP à Opglabbeek

« Au fur et à mesure des concours, il a pris une expérience de dingue. En avril dernier, j’ai sauté mon premier CSIOP à Opglabbeek. C’était mon rêve de pouvoir intégrer l’équipe. En plus, les résultats étaient au rendez-vous puisque nous sommes 2es de la Coupe des nations ! ». Nullement perturbée par la pression de cette première sélection, la jeune fille se démarque dans le Grand Prix (5e) et offre à l’équipe un joli clear round dans la seconde manche de la Coupe. « J’ai fait deux barres en première manche, j’étais un peu dans l’entre-deux, je ne l’ai pas spécialement bien monté, je l’ai trop repris dans les contrats. Je suis partie avec la tête froide pour la deuxième manche, j’ai réussi à mieux le monter et on sort sans faute ».

Dans la foulée, Emma et Bad Boy représentent à nouveau les couleurs françaises lors du CSIOP de Fontainebleau. « Sur cette compétition, Bad Boy était encore mieux ! J’ai abordé ce CSIOP de la même manière : j’étais décontractée, calme, je le sentais bien. Je fais une barre sur le dernier dans la première manche de la Coupe des nations, c’était très rageant. En tout cas, je n’ai pas du tout été impressionnée de courir en France, devant notre public, car quand je monte Bad Boy, je suis dans ma bulle, je ne fais attention à rien d’autre. En plus, pendant la Coupe, Olivier (Bost, ndla) est très présent, il insuffle l’esprit équipe de France. Il veut qu’on réussisse et qu’on fasse bien les choses, mais il ne met pas la pression », dit l’amazone, qui s’apprêtait, au moment de cette rencontre, à prendre dix jours plus tard le départ pour l’Allemagne ! « J’espère pouvoir à nouveau courir l’épreuve par équipes. Le Grand Prix sera à 1,35 m, je suis contente car il s’agira de notre premier tour sur cette hauteur ».

Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont – ph. Poney As
Emma Gay Le Breton et Bad Boy du Beau Mont – ph. Poney As

Emma Gay Le Breton passe assurément l’une de ses plus belles saisons sportives avec Bad Boy du Beau Mont, la dernière sur le circuit Poney. A ce stade, elle vise les championnats d’Europe de Strzegom. « Ce qui est fou, c’est qu’avant, je ne savais même pas ce qu’était un Grand Prix Poney ! Porter les couleurs de l’équipe de France, ça a été mon rêve lorsque j’ai commencé à faire les As 1 », confie-t-elle.
Le dernier week-end de mai, Emma a été sacrée championne de France Cadet avec sa jument Caféine des Flagues. Maintenant c’est sûr : « j’aimerais bien continuer à faire pareil à cheval ! Le circuit Poney m’a donné le goût des grosses compétitions ! ».

Les poneys, oui, mais les chevaux aussi !

Outre Bad Boy, Emma Gay Le Breton monte un poney qui lui est confié : Fahrenheit de Vatmo. Avec lui, elle sort en As 2 / As 1.
La cavalière monte aussi à cheval depuis deux ans. Avec Caféine des Flagues, sa partenaire de victoire au championnat de France Cadet, Emma pense pouvoir courir le circuit Junior, du moins les épreuves à 1,40 m. Si ses poneys sont au Haras de Maison Blanche, ses deux juments (Caféine et Cop Copine BHS Z) sont à Dourdan chez Pauline Guignery. « Comme mes juments ne sont pas au même endroit, nous faisons tous les jours avec ma mère une heure et quart de trajet pour que je puisse m’entraîner. Bad Boy a un jour « off » dans la semaine, sinon je le monte tous les jours. Je travaille mes juments trois ou quatre fois par semaine, selon mon programme de concours avec Bad Boy, les autres jours, c’est Pauline qui prend le relais ».


 

Le prochain magazine Poney As sera disponible gratuitement lors des championnats de France de Lamotte-Beuvron
Article publié dans le magazine Poney As de juillet